Guillaume MARCHESSAUX soutiendra sa thèse le lundi 6 Mai 2019 à 14:00, Amphithéâtre OCEANOMED

Sur le sujet suivant : "Etude de l’anthroposystème emblématique de l’étang de Berre : approches écosystémique et sociologique de l’impact du cténaire invasif Mnemiopsis leidyi"

Ecole doctorale  : Sciences de l'environnement (251)

Directeur : Delphine Thibaut, Maitre de conférence
Co -directeur : Cécilia Clayes, Maitre de conférences

Résumé

Etude de l’anthroposystème emblématique de l’étang de Berre : approches écosystémique et sociologique de l’impact du cténaire invasif Mnemiopsis leidyi

L’étang de Berre est un écosystème lagunaire historiquement perturbé par de forts rejets industriels et par des apports importants en eau douce naturels et anthropiques (centrale hydroélectrique EDF). Alors que les politiques de réhabilitation de l'étang de Berre, initiées depuis 1994, commencent à enregistrer leurs premiers succès, l'introduction et la prolifération de Mnemiopsis leidyi en 2005 pourraient limiter leur efficacité. L’originalité de cette étude est d’associer océanographie et sociologie afin d’estimer l’impact de M. leidyi sur le fonctionnement de ce socio-écosystème. Nous avons pu montrer que la population de M. leidyi est capable de se maintenir sur une large gamme de températures (3°C-28°C) et de salinités (10-30), pour une quantité de carbone disponible > 3 µgC L-1. Nous avons démontré en laboratoire que la ponte est observée chez les adultes dès 8°C, et à partir de 10°C chez les larves transitoires. La température apparait ainsi être un facteur déterminant dans la dynamique de la population de ce cténaire. Les larves voient leur développement en adulte bloqué pour des températures inférieures à 14°C. En été la population est dominée par des adultes dont les taux de reproduction sont élevés (2 221 ± 2 496 œufs ind-1 j-1) soutenant de larges blooms (jusqu’à 96 ind m-3). L’ingestion de Mnemiopsis sur la communauté zooplanctonique (principalement copépodes et larves méroplanctoniques) est très variable de 4 ± 2 proies ind-1 j-1 à 1 370 ± 97 proies ind-1 j-1, mais montre une capacité à contrôler jusqu’à 80 % du stock de zooplancton réduisant le control top-down sur les communautés phytoplanctoniques. De plus, Mnemiopsis contribue faiblement via son excrétion N-NH4 (jusqu’à 3,8 %) au pool d’Ammonium et à la production régénérée, favorisant aussi la croissance du phytoplancton. De ce fait, la population agit favorablement sur le maintien de l’eutrophisation de l’étang de Berre par effet « top-down » et « bottom-up ». L’absence de ce cténaire au cours d’évènements froids et sa réapparition plusieurs mois après laissent penser soit à l’existence d’une source externe à l’étang ou à la présence de zone refuge. L’utilisation de la modélisation lagrangienne des transports de particules couplée aux mesures des variables environnementales a non seulement permis de comprendre la distribution de Mnemiopsis dans l’étang mais aussi d’identifier une zone refuge (l’étang de Vaine) favorable au maintien de M. leidyi. Les fortes proliférations de M. leidyi dans l’étang de Berre affectent principalement la pêche professionnelle. Le fort colmatage des filets, la mutilation des prises, la dégradation accélérée du matériel et l’augmentation de la pénibilité induisent une perte économique annuelle estimée à 50 % par les pêcheurs. La baignade est peu impactée sauf en cas de fortes proliférations durant lesquelles il peut y avoir désertion des plages de la lagune, de même, le nautisme n’indique une gêne qu’en cas de fortes proliférations lorsque les cténaires colmatent les circuits de refroidissement des moteurs. Dans le cadre interdisciplinaire, la compréhension des interactions biologiques et anthropiques a permis de montrer que Mnemiopsis présentait une entrave à la mise en œuvre des efforts de réhabilitation. De plus, la récente installation de l’hydroméduse invasive urticante Gonionemus vertens pourrait également être une menace en raison de l’élargissement de son aire de répartition liée à la transplantation des herbiers à zostère. Par conséquent, dans un contexte d’invasions biologiques, les perspectives de réhabilitation de l’étang de Berre restent toutefois soumises au caractère imprévisible de la nature.

Mots clés : Mnemiopsis leidyi, Espèce invasive, Ecophysiologie, Interdisciplinarité, Etang de Berre

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