L'aire marine protégée de Port-Cros, un trop petit joyau de biodiversité : une interview sur France Info de Charles-François Boudouresque, professeur émérite au MIO et membre du conseil scientifique du parc national de Port-Cros

En clôture du One Ocean Summit, ce vendredi 11 février à Brest, Emmanuel Macron a annoncé l'extension de la réserve naturelle des Terres australes françaises, qui va devenir la deuxième plus grande aire marine protégée du monde. 

En France, la première aire marine protégée a été créée en 1963 dans le Parc national de Port-Cros dans le Var. Il faut compter une demi-heure de traversée pour rejoindre l'Île de Port-Cros depuis le port du Lavandou. Eric, électricien, travaille sur l'île. En tant que pêcheur amateur, il confirme que les bienfaits de l’aire marine protégée se voient à l’œil nu : "Vous avez des grosses dorade, des gros sars, des loups... Dans les autres ports, on en voit des petits, mais pas des gros."

Un "aquarium grandeur nature"

Les poissons sont en effet plus nombreux, leur taille est également plus importante. Pour s'en rendre compte, il faut aller sous l'eau. "Dans certaines zones, les plongeurs ont l'impression de se trouver dans une sorte d'aquarium grandeur nature", explique Charles-François Boudouresque, professeur d’océanographie et membre du conseil scientifique du parc national de Port-Cros. C'est ce qu'il appelle "l'effet réserve" : "Ça peut être évidemment la réapparition d'espèces qui ont disparu ailleurs, d'espèces rares. Ça a été d'ailleurs le cas du mérou, qui avait pratiquement disparu à Port-Cros et qui est réapparu."

"Il y a aussi aspect exportation. Nous avons une sorte de machine à produire des oeufs, à produire des larves. Avec les courants, tout ceci est entraîné dans les zones extérieures et donc contribue au repeuplement bien au-delà des limites de l'aire marine protégée."

Charles-François Boudouresque, professeur d'océanographie

Une zone de pêche interdite trop peu étendue

Port-Cros, c’est donc un petit joyau de biodiversité, mais les zones où toutes les formes de pêches sont interdites représentent une infirme partie. Alexandre Meinesz, professeur émérite de biologie marine à l’Université Côte d’Azur, le déplore : "Une véritable réserve marine qui protège toute la biodiversité, c'est là où le principal facteur de déstabilisation des écosystèmes est interdit, c'est-à-dire la pêche. Or, quand on associe les zones de non prélèvement de toutes les côtes françaises de Méditerranée, on constate que ça représente 0,6 % du territoire, donc presque rien n'est protégé."

Pour atteindre l’objectif que la France s’est fixée, à savoir 10% de protection forte des eaux territoriales pour 2030, il faudra donc redoubler d’efforts, mettre des moyens pour renforcer les patrouilles notamment, et faire accepter aux pêcheurs ces nouveaux interdits. 

En savoir plus