MICROPRONY

Fonctionnement de l'écosystème microbien du système hydrothermal alcalin de Prony, Nouvelle Calédonie - ANR MICROPRONY (2020-2025)

PI: Gael Erauso

Le projet MICROPRONY a pour objet l'étude d'un système hydrothermal alcalin serpentinisé de faible profondeur, unique en son genre, situé en Baie de Prony dans le lagon sud de la Nouvelle-Calédonie.

La circulation hydrothermale à Prony est créée par des réactions de serpentinisation en profondeur alors que l'eau météorique s'infiltre à travers les péridotites, générant des fluides très alcalins, riches en H2, CH4 et composés organiques formés de manière abiotique. Ce système a des caractéristiques similaires à celles de sources serpentinisées terrestres (ex:  Californie, Oman) mais aussi sous-marines (ex. Lost City).

L'étude de ces systèmes apporte des éléments importants pour la compréhension des processus à l'origine de la vie sur Terre.

L'objectif principal du projet - qui s'appuie sur les résultats de nos recherches antérieures sur ce site - est de comprendre le fonctionnement de cet écosystème, en se focalisant sur les métabolismes utilisant l'H2, le CH4, et les composés organiques formés abiotiquement.

Nos hypothèses de travail sont les suivantes:

1. Les microorganismes de Prony sont spécifiques aux environnements serpentinisés et ont développé des stratégies métaboliques spécifiques pour faire face à des conditions de vie particulières (peu/pas d'accepteurs d'électrons, pH très élevé, peu/pas de CID);
2. Contrairement à l'hypothèse largement partagée selon laquelle la vie microbienne dans le sous-sol est principalement due à la chimiolithoautrophie (l'hypothèse SLIME), nous proposons que les composés organiques produits par les réactions de serpentinisation permettent la croissance de bactéries chimioorganotrophes (notamment des incultivés apparentées aux Clostridiales ou aux Phyla candidats tels que Parcubacteria, Acetothermia, Omnitrophica) et possiblement des archées méthanogènes. Ces bactéries pourraient ainsi constituer des producteurs primaires majeurs dans ce type d'écosystèmes.

Pour répondre de manière exhaustive à ces deux hypothèses, nous proposons une approche multidisciplinaire portée par une équipe scientifique réunissant les meilleurs spécialistes dans leur domaine. Cette approche intégrera des techniques analytiques de pointe permettant de couvrir une large gamme de résolution spatiale.

Elle est subdivisée en 5 tâches principales :

1. Identifier les principaux acteurs microbiens de l'écosystème de Prony et élucider leurs fonctions en utilisant des approches culturales et moléculaires (métagénomique);
2. Caractériser l'âge, la nature et la structure des habitats microbiens, leur microflore associée, et les interactions microorganismes-minéraux, grâce à un éventail de techniques de datation isotopique, d'imagerie moléculaire (microscope CLSM couplé-spectrométrie Raman/FTIR, FISH, MEB), de microdissection et de génomique sur cellule unique;
3. Décrire en détail la géochimie des fluides pour une interprétation fiable des processus biogéochimiques opérant à Prony et les comparer avec ceux d'autres systèmes serpentinisés terrestres ou marins en utilisant un panel de techniques d'analyses géochimiques;
4. Déterminer l'importance relative des productions biotiques vs abiotiques notamment du CH4 et d'autres composés organiques (HC, formate, etc) présents dans les fluides, par des méthodes de thermométrie en isotopes couplés (13C et D);
5. Modéliser les métabolismes clés de l'écosystème microbien de Prony en intégrant d'une part les calculs de bioénergétique basés sur la thermodynamique des réactions métaboliques et les données de géochimie, d'autre part l'annotation des métagénomes/métatranscriptomes.

La réalisation du programme scientifique proposé ici nous permettra de définir de façon exhaustive les interactions entre les processus géochimiques et microbiologiques dans un environnement qui a pu être courant sur la Terre au début de son histoire et qu'on peut aujourd'hui comparer à celui d'autres planètes du système solaire, candidates pour héberger des formes de vie extra-terrestres (ex. Europe, Encelade).

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